La Tuna de Distrito de Pau



La Tuna dans la Littérature :

XIII° siècle

elon les experts et les investigateurs "Razón de amor, con los denuestos del agua y el vino, o Siesta de abril" , (Raison d'Amour, et les disputes de l'eau et du vin, ou Sieste d'avril), oeuvre anonyme du début du XIII° siècle, est un des premiers extraits de la littérature espagnole.
Elle fut copiée par Lope de Moros, a qui on attribue souvent la paternité de l'œuvre.
Le narrateur-protagoniste est un étudiant qui a beaucoup voyagé ...

"... Un escolar la rimo
que siempre dueñas amo;
mas siempre hobo criança
en Alemania y en Françia,
moro mucho en Lombardia
pora aprender cortesia. ..."
"... Un escolier la rima,
qui toujours dames aima.
Mais il eut aussi descendance
en Allemagne et en France,
et demeura beaucoup en Lombardie
pour apprendre la courtoisie. ..."
dont la sieste est interrompue par le chant d'amour d'une jeune fille. Reconnaissant celle qu'il courtise secrètement, il lui demande si elle a déjà connu l'amour. Elle lui répond :
"... "A plan, con grant amor ando,
mas non conozco mi amado;
pero dizem' un su mesajero
que es clérigo e non caballero,
sabe muito de trovar
de leyer e de cantar; ..."
"[...] "En vérité, je connais un grand amour
mais je ne connais pas mon aimé
mais ses messages disent
qu'il est escolier et non chevalier
sait bien faire des vers
lire et chanter; [...]"
puis elle le reconnait grâce au ruban qu'elle lui avait offert
"[...] ela coñoció una mi cinta man a mano,
qu'ela la fiziera con la su mano. [...]"
"[...] elle reconnut aussitôt sur moi un ruban
qu'elle avait fait de sa main. [...]"
Après s'être embrassés et consolés, elle disparaît. A la fin de l'œuvre, l'étudiant contemple une colombe qui verse de l'eau d'un verre sur le vin d'un autre, et provoque une querelle entre les deux éléments.
La différence entre les sections fait pensez à deux œuvres distinctes, coordonnées postérieurement, mais il a une unité dans le texte, qui surprend par son contenu.
La première partie est associée à l'amour courtois; avec son environnement bucolique et primesautier.
La seconde, aux poèmes goliards avec un référence claire au débat clerc-chevalier.

En 1228, le concile de Valladolid établi de sévères interdictions afin que les étudiants "ne se trouvent pas en compagnie de ces jongleurs et noctambules, et qu'is évitent d'entrer dans les tavernes".

En 1248, Alphonse X Le Sage, dans "Las Partidas", se réfère aux soupistes en ces termes :
"Ces escoliers qui chantent et jouent d'un instrument pour trouver subsistance".

le "Liber Constitutionem" de l'Université de Lérida, établi en septembre 1300 par Jaime II d'Aragon fait réference aux "escoliers qui vont nuitamment ", les menaçant de confisquer leurs instruments, car ils perturbent la quiétude et le repos de la cité ("Si vero de nocte[...]fuerint [...] cum musicis instrumentis reperti [...] perdant imstrumenta[...]”).


XIV° siècle

L'Archiprêtre de Hita composa plus de dix cahiers de chants pour "escolares que andan nocherniegos e para muchos otros por puertas andariegos ", et dans son livre "Libro del Buen Amor" fait référence à l'aspect mendiant de ces étudiants :

"[...]Señor, dat al escolar
que vos viene a demandar
dat merced e ración
y os cantará una canción
de solaz
fare por vos, oracion
que dios os de salvación
quered por dios, a mi dar[...]
"[...]Monsieur donnez à l'escolier
qui viens vous demander
Donnez aumône ou ration
et il vous chantera une chanson

ferai pour vous oraison
que Dieu vous sauve
plaise à Dieu, que vous me donniez[...]

Dans " La vida del Pícaro Guzmán de Alfarache "(1599) de Mateo Alemán (1547-1615?) on peut lire :
Il y depeint les séranades des étudiants d'Alcalá et se demande où, entre autres choses, on joue une musique comme celle d'Alcalá, ou où on peut trouver tant de bonnes façons, tant de discipline dans la musique.
"… ils ne voulaient voir aucun livre, ni participer à ce pourquoi ils été venus à l'Université; les guitares ne quittaient jamais leur mains, ils étaient d'un grand divertissement, chantaient de bons sonnets, en avaient toujours de nouveaux et les donnaient très bien accompagnés de leur instrument".
On y parle aussi des mauvais traitements infligés aux nouveaux.
" Oh, douce vie que celle des étudiants! L'un joue les petit évèque, l'un maltraite les nouveaux, les mettant sur la roue, les laissant dehors par temps de neige, les bastonnant, leur enlèvant la patente, ne leur laissant ni livre ni manteau sur les épaules!".

Dans "La Tía Fingida", œuvre attribuée à Cervantes (1547-1616), les étudiants de Salamanca donnent une sérénade, "car c'est le premier service que les étudiants pauvres rendent à leurs dames", au cours de laquelle interviennent "quatre musiciens chantant et jouant de la guitare, un psaltérion, une harpe, une bandurria, douze clarines et une cornemuse de Zamora, trente boucliers et autant de cottes".
dans la même œuvre on peut lire ce conseil que la tante donne à sa nièce:
" Souviens-toi, ma fille, que tu es à Salamanque, que l'on appele dans le monde entier "Mère des Sciences", archive des habiletés, trésorière des bons ingénieux, et où d'ordinaire étudient et habitent dix ou douze mille étudiants, de bels gens, fantasques, impétueux, libres, passionnés, dépensiers, discrets, diaboliques et de bonne humeur".

Dans "Histroria de la vida del Buscón llamado don Pablos, Ejemplo de vagamundos y espejo tacaños"(1604), Fransico de Quevedo (1580-1645) fait référence à la période d'apprentissage :
"Je suis entré dans la patio, je n'avais pas encore posé le pied qu'ils m'affrontèrent et commencèrent à dire : "Nouveau!" Moi, feignant l'indifférence, je me mis à rire, mais ce ne fut pas suffisant et huit ou neuf d'entre eux vinrent à moi en riant…"
Et à son intronisation dans le groupe :
"Vive le compagnon, qu'il soit admis en notre amitié; jouisse des primautés d'ancien, puisse avoir la gale, aller souillé et souffrir la même faim que tous!"

Dans le "Libro de entretenimiento de la pícara Justina" (1605) attribué à Francisco López de Úbeda, on dépeint une joyeuse bande d'étudiants :
"[...] vis apparaître une bande d'étudiants déguisés qui venait en file, comme une volée de grues, dansant et chantant à merveille. Ils étaient sept camarades, fameux vauriens qui par excellence s'intitulaient "la Bigornia", et qui étaient connus sous ce nom dans tout Campos, et pour cela avaient aussi l'habitude de s'appeler les Compeones (NDT : Champions). Ceux-ci avaient pour capitaine un jeune homme grand et sec, qu'ils appelaient l'évêque don pero grullo, et ce nom lui allait bien.[…] Celui-ci venait en habit d'évêque picaresque. Il avait à son côté un autre étudiant vêtu de guenilles qu'ils appelaient la Boneta (Bonnette)[…]. Les cinq autres étaient déguisés en chanoines et archidiacres, à la picaresque. L'un s'appelait mamelouk, l'autre le scorpion, l'autre la quille, un autre poulpe, l'autre le Draque , les attitudes et les tailles s'accordaient bien avec leurs noms.[…] Bien que tous ceux de la Bigornia aillent en chantant, aucun de leurs membres n'était au repos, car avec les pieds ils dansaient, avec le corps ils faisaient des cabrioles, avec la main gauche ils produisaient leurs papiers d'identité, avec la droite ils dansaient, avec la bouche ils chantaient, et ils dévoraient les jeunes filles des yeux […]." Ces sobriquets prouvent que la tradition de surnommer les étudiants capigorrones est ancestrale.

Torres Villarroel, au XVIII siècle, est l'archétype de l'étudiant errant, musicien, torero et ermite qui joue, chante et danse pour se nourrir lors d'un voyage en Espagne et au Portugal. Il s'en retourne à la fin dans sa mère patrie, Salamanque, pour occuper, paradoxallement, une chaire de mathématiques.

Picaresque, avec un P majuscule, voilà l'adjectif qui qualifie le mieux ces tunas des temps anciens. L'ingéniosité diabolique des étudiants leur permet d'obtenir tout ce dont ils ont besoin, les libérant de la faim qui les accable et des multiples problèmes qu'ils ne manquent pas de rencontrer chemin faisant. Les "honnêtes" tunas actuelles n'ont plus grand choses à voir avec ces groupes qui étaient tout un "ramassis de chemineaux, joie des jeunes filles, terreur des aubergistes, frayeur des maîtresses de maisons et zozobra des pères." (Antonio Maestre y Alonso, "La Universidad de Salamanca, Recuerdos del Siglo XVII", en Revista de España, Madrid 1890.)
Et leurs exactions, quintessence d'une vie quasi-délictueuse, sont tristement célèbres, car les étudiants "lors de leurs excursions étaient la terreur des hostelleries et la peste des auberges, car ni l'hôte ni les voyageurs n'étaient à l'abri de leurs inventions malignes […] Jamais les hordes de Tamerlan ne firent tant de ravages qu'eux, s'ils pouvaient assaillir au milieu de la nuit le poulailler ou la dépense de l'hôtelier ou de quelque maison du voisinage, ceux-ci auraient préféré voir entrer une meute de renards à la basse-cour qu'une troupe d'étudiants. Dans les dépenses, tous les chats d'un couvent ne se seraient pas donnés autant de joie, aucun chorizo ni jambon ne pouvaient rester à l'abri de leur voracité, et Sinon ne déploya pas autant d'astuce pour faire entrer les Grecques dans Troyes qu'ils n'en déployaient pour chaparder à manger dans les recoins les plus reculés." (Julio Monreal, "Correr la Tuna", en Almanaque de la Ilustración, Madrid 1879, p. 70.).


XIX° siècle

Du XIX° siècle nous sont parvenues de nombreuses revues de mœurs et des récits de voyageurs relatant les exploits de la Tuna.

En 1862, le Baron Charles Davillier effectue un "Voyage en Espagne", titre du reportage qu'il en ramènera.
Publié dans le revue française "Le Tour du Monde", et agrémenté des illustrations de son compagnon de route, le célèbre Gustave Doré, il deviendra un des témoignages les plus complets et les plus accrédités sur la Tuna au XIX° siècle.
Les tunos y sont reflétés sous tous leurs aspects : soupistes et mendiants, troubadours et romantiques.
Dans certains morceaux choisis de ces article on peut lire :
<< … à propos de la faim des étudiants, il y a en Espagne plusieurs couplets:
"Quand un étudiant arrive à l'angle d'une place, les revendeuses disent : Dehors ce chien de chasse!"
Cet autre :
" Quand l'étudiant sort au marché couvert, les jambons et charcuteries se mettent en mouvement."
Ou celui-ci :
"De la cuillère de bois que porte les étudiants, on fabriqua les portes du Château d'Alicante." >>
On les y dépeint donnant la sérénade, animant le carnaval ou quêtant pour quelques sinistrés.
"Maintenant que nous nous trouvons dans une ville, autrefois célèbre pour son Université, nous ne devons pas oublier de mentionner un des genres les plus curieux de l'ancienne Espagne. Nous voulons parler de ces étudiants que l'on appèle communément "étudiants tunantes" ou "de la tuna" […] Les anciens romans picaresques sont pleins de récits de l'espièglerie dont les étudiants espagnols faisaient montre en leur temps […] Il y a plus d'un point commun entre la vie des étudiants de la tuna et celle des anciens chevaliers errants, jongleurs et troubadours du Moyen-Age. Pauvres et nomades comme les premiers, poètes et musiciens comme les seconds, comme les représentent les peintures et les chansons populaires, chantant sous les fenêtres et les balcons, et tendant leur bicorne pour demander quelque sou en échange de ses jotas et de ses seguidillas. On les rencontres souvent, dans leurs pérégrinations, avec des muletiers qui passent, comme eux, une bonne partie de leur existence sur les routes principales et qui, souvent, leurs prêtent leurs montures […]."
"… des instruments favoris des étudiants, ceux qui tiennent la première place sont la guitare et le tambourin. En jouant du tambourin, surtout, ils font briller leur talent avec une habileté et une légèreté incroyables. L'étudiant, non seulement fait sonner la peau avec ses doigts, lui imprimant un mouvement rotatif très rapide, mais il le joue aussi avec le coude, avec le nez, avec la tête, avec les genoux et avec la pointe des pieds. Après l'avoir fait passer alternativement sous chacune de ses jambes, il le lance prestement en l'air et le rattrape au bout du doigt, et la fait sonner en frappant, l'une après l'autre, les têtes des garnements qui les contemplent et tout cela, évidement, sans perdre la mesure."
"… Mais la passion dominante de l'étudiant espagnol est la guitare. Il n'y a pas une Tuna qui ne compte plusieurs virtuoses de premier rang. Les autres savent en jouer tant bien que mal. On a d'ailleurs l'habitude de dire "Un étudiant sans guitare est comme une comète sans queue…".

Théophile Gautier dans son propre "Voyage en Espagne", édité à Paris en 1888, nous fait à peu près le même récit :
"Pendant notre déjeuner arriva un groupe d'étudiants en goguette; ils étaient quatre et paraissaient plus des modèles de Ribera ou de Murillo que des élèves en théologie car ils étaient harapientos, pieds nus et sales. Ils chantaient des chansonnettes jocosas, s'accompagnant d'un tambour basque, d'un triangle et de castagnettes; celui qui jouait du tambourin était virtuose en la matière; il faisait résonner la peau d'âne avec les genoux, les coudes, les pieds, et, quand tous ces moyens de percussion ne lui suffisaient plus, il dirigeait le disque orné des pièces de cuivre vers la tête de quelque gamin ou de quelque vieille. L'un d'entre eux, l'orateur du groupe, faisait la quête en entonnant avec un grand desparpajo toutes sortes de chascarrillos pour stimuler la générosité de l'auditoire. "Une petite pièce!", criait-il en adoptant les postures les plus suppliantes, "Pour pouvoir terminer mes études, devenir curé et vivre sans rien faire!". Chaque fois qu'il obtenait quelque pièce, il la mettait sur son front, à côté de celle déjà obtenue, exactement comme les almées (danseuses égyptiennes), qui, à la fin de la danse, couvraient son visage suant de cequis et de piastres que lui jetaient les osmanlis extasiés".

Comme l'a si bien exprimé D. Emilio de la Cruz y Aguilar dans ses "Chrónicas de la Tuna" :
"Malgré les temps qui passent et changent, les tunos continuent d'êtres les vifs témoins de la jeunesse de toujours, les mêmes anciens troubadours étudiants qui cultive l'art de la poésie populaire, ces chers universitaires noctambules qui, depuis déjà plusieurs siècles, se succèdent, parcourent le monde en faisant la cour, cultivent les instruments populaires et pratiquent un genre musical directement apparenté aux sérénades médiévales ou aux chants des étudiants désargentés, témoignant ainsi de ce phénomène culturel unique…"

Du même auteur cette définition :

" ... regroupement de scolaires troubadours pour trouver subsistance, parcourir les terres et servir les dames de celles-ci avec courtoisie.
Ainsi donc la Tuna est école de vie, creuset d'amis nouveaux et épreuve des anciens, arène d'habileté, ourdisseuse de songes … source de joies et fierté d'Espagne… "
("Libro del Buen Tunar" de Emilio de la Cruz y Aguilar).

à lire :
  • "Razón de amor, con los denuestos del agua y el vino, o Siesta de abril", poème anonyme du XIII° siècle
  • "Arte Tunantesca o diálogo entre dos tunantes", auteur inconnu. Valladolid fin du XVIII° siècle
  • "Voyage en Espagne", Theóphile Gautier, Ed. G. Charpentier & C, Paris, 1888
  • "Libro del Buen Amor", Juan Ruiz, Arcipreste de Hita. Ed. Espasa-Calpe, Madrid, 1967
  • "Diccionario de Autoridades", Real Academia Española. Ed. Grados, Madrid, 1969(1723)
  • "Beca Roja", José Poch. Ed. Espasa-Calpe, Madrid, 1978
  • "Historia de una Tuna", Ismael Muñoz y Luis Matilla. Ed. Ed. Espasa-Calpe, Madrid, 1978
  • "Guzmán de Alfarache", Mateo Alemán. Ed. Cátedra, Madrid, 1984
  • "Libro del Buen Tunar", Emilo de la Cruz y Aguilar. Ed. Cívitas, Madrid, 1986
  • "Chronicas de la Tuna o memoria de andariegos y vagantes escolares", Emilo de la Cruz y Aguilar. Ed. Cívitas, Madrid, 1988
  • "Ayer, Hoy y Siempre...la Tuna pasa. Estudio de Este Negro Menester...", auteur inconnu, fichier pdf.

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